1、Jean Racine Phdre Auteur : Jean Racine Catgorie : Thatre Phdre, amoureuse dHyppolyte, ne voit pour se librer de cette maldiction, que la mort. Licence : Domaine public Prface Voici encore une tragdie dont le sujet est pris dEuripide. Quoique jaie suivi une route un peu diffrente de celle de cet aute
2、ur pour la conduite de laction, je nai pas laiss denrichir ma pice de tout ce qui ma paru le plus clatant dans la sienne. Quand je ne lui devrais que la seule ide du caractre de Phdre, je pourrais dire que je lui dois ce que jai peut.tre mis de plus raisonnable sur le thatre. Je ne suis point tonn q
3、ue ce caractre ait eu un succs si heureux du temps dEuripide, et quil ait encore si bien russi dans notre sicle, puisquil a toutes les qualits quAristote demande dans le hros de la tragdie, et qui sont propres exciter la compassion et la terreur. En effet, Phdre nest ni tout fait coupable, ni tout f
4、ait innocente. Elle est engage, par sa destine et par la colre des dieux, dans une passion illgitime, dont elle a horreur toute la premire. Elle fait tous ses efforts pour la surmonter. Elle aime mieux se laisser mourir que de la dclarer personne, et lorsquelle est force de la dcouvrir, elle en parl
5、e avec une confusion qui fait bien voir que son crime est plut.t une punition des dieux quun mouvement de sa volont. Jai mme pris soin de la rendre un peu moins odieuse quelle nest dans les tragdies des Anciens, o elle se rsout delle.mme accuser Hippolyte. Jai cru que la calomnie avait quelque chose
6、 de trop bas et de trop noir pour la mettre dans la bouche dune princesse qui a dailleurs des sentiments si nobles et si vertueux. Cette bassesse ma paru plus convenable une nourrice, qui pouvait avoir des inclinations plus serviles, et qui nanmoins nentreprend cette fausse accusation que pour sauve
7、r la vie et lhonneur de sa ma.tresse. Phdre ny donne les mains que parce quelle est dans une agitation desprit qui la met hors delle.mme, et elle vient un moment aprs dans le dessein de justifier linnocence et de dclarer la vrit. Hippolyte est accus, dans Euripide et dans Snque, davoir en effet viol
8、 sa belle.mre : vim corpus tulit. Mais il nest ici accus que den avoir eu le dessein. Jai voulu pargner Thse une confusion qui laurait pu Prface Phdre rendre moins agrable aux spectateurs. Pour ce qui est du personnage dHippolyte, javais remarqu dans les Anciens quon reprochait Euripide de lavoir re
9、prsent comme un philosophe exempt de toute imperfection ; ce qui faisait que la mort de ce jeune prince causait beaucoup plus dindignation que de piti. Jai cru lui devoir donner quelque faiblesse qui le rendrait un peu coupable envers son pre, sans pourtant lui rien .ter de cette grandeur dame avec
10、laquelle il pargne lhonneur de Phdre, et se laisse opprimer sans laccuser. Jappelle faiblesse la passion quil ressent malgr lui pour Aricie, qui est la fille et la soeur des ennemis mortels de son pre. Cette Aricie nest point un personnage de mon invention. Virgile dit quHippolyte lpousa, et en eut
11、un fils, aprs quEsculape leut ressuscit. Et jai lu encore dans quelques auteurs quHippolyte avait pous et emmen en Italie une jeune Athnienne de grande naissance, qui sappelait Aricie, et qui avait donn son nom une petite ville dItalie. Je rapporte ces autorits, parce que je me suis trs scrupuleusem
12、ent attach suivre la fable. Jai mme suivi lhistoire de Thse, telle quelle est dans Plutarque. Cest dans cet historien que jai trouv que ce qui avait donn occasion de croire que Thse f.t descendu dans les enfers pour enlever Proserpine, tait un voyage que ce prince avait fait en Epire vers la source
13、de lAchron, chez un roi dont Pirithos voulait enlever la femme, et qui arrta Thse prisonnier, aprs avoir fait mourir Pirithous. Ainsi jai tach de conserver la vraisemblance de lhistoire, sans rien perdre des ornements de la fable, qui fournit extrmement la posie ; et le bruit de la mort de Thse, fon
14、d sur ce voyage fabuleux, donne lieu Phdre de faire une dclaration damour qui devient une des principales causes de son malheur, et quelle naurait jamais os faire tant quelle aurait cru que son mari tait vivant. Au reste, je nose encore assurer que cette pice soit en effet la meilleure de mes tragdi
15、es. Je laisse aux lecteurs et au temps dcider de son Prface Phdre vritable prix. Ce que je puis assurer, cest que je nen ai point fait o la vertu soit plus mise en jour que dans celle.ci. Les moindres fautes y sont svrement punies ; la seule pense du crime y est regarde avec autant dhorreur que le c
16、rime mme ; les faiblesses de lamour y passent pour de vraies faiblesses ; les passions ny sont prsentes aux yeux que pour montrer tout le dsordre dont elles sont cause ; et le vice y est peint partout avec des couleurs qui en font conna.tre et ha.r la difformit. Cest l proprement le dut que tout hom
17、me qui travaille pour le public doit se proposer, et cest ce que les premiers potes tragiques avaient en vue sur toute chose. Leur thatre tait une cole o la vertu ntait pas moins bien enseigne que dans les coles des philosophes. Aussi Aristote a bien voulu donner des rgles du pome dramatique, et Soc
18、rate, le plus sage des philosophes, ne ddaignait pas de mettre la main aux tragdies dEuripide. Il serait souhaiter que nos ouvrages fussent aussi solides et aussi pleins dutiles instructions que ceux de ces potes. Ce serait peut.tre un moyen de rconcilier la tragdie avec quantit de personnes clbres
19、par leur pit et par leur doctrine, qui lont condamne dans ces derniers temps et qui en jugeraient sans doute plus favorablement, si les auteurs songeaient autant instruire leurs spectateurs qu les divertir, et sils suivaient en cela la vritable intention de la tragdie. Prface Introduction Tragdie. P
20、ersonnages. Thse, fils dEge, roi dAthnes. Phdre, femme de Thse, fille de Minos et de Pasipha. Hippolyte, fils de Thse et dAntiope, reine des Amazones. Aricie, princesse du sang royal dAthnes. Oenone, nourrice et confidente de Phdre. Thramne, gouverneur dHippolyte. Ismne, confidente dAricie. Panope,
21、femme de la suite de Phdre. Gardes. La scne est Trzne, ville du Ploponnse. Introduction Acte premier Scne I Hippolyte, Thramne Hippolyte Le dessein en est pris : je pars, cher Thramne, Et quitte le sjour de laimable Trzne. Dans le doute mortel dont je suis agit, Je commence rougir de mon oisivet. De
22、puis plus de six mois loign de mon pre, Jignore le destin dune tte si chre ; Jignore jusquaux lieux qui le peuvent cacher. Thramne Et dans quels lieux, Seigneur, lallez.vous donc chercher ? Dj pour satisfaire votre juste crainte, Jai couru les deux mers que spare Corinthe ; Jai demand Thse aux peupl
23、es de ces bords O lon voit lAchron se perdre chez les morts ; Jai visit lElide, et laissant le Tnare, Pass jusqu la mer qui vit tomber Icare. Sur quel espoir nouveau, dans quels heureux climats Croyez.vous dcouvrir la trace de ses pas ? Qui sait mme, qui sait si le roi votre pre Veut que de son abse
24、nce on sache le mystre ? Et si, lorsque avec vous nous tremblons pour ses jours, Tranquille et nous cachant de nouvelles amours, Ce hros nattend point quune amante abuse. Hippolyte Cher Thramne, arrte, et respecte Thse. Acte premier Phdre De ses jeunes erreurs dsormais revenu, Par un indigne obstacl
25、e il nest point retenu ; Et fixant de ses voeux linconstance fatale, Phdre depuis longtemps ne craint plus de rivale. Enfin en le cherchant je suivrai mon devoir, Et je fuirai ces lieux que je nose plus voir. Thramne H ! depuis quand, Seigneur, craignez.vous la prsence De ces paisibles lieux si cher
26、s votre enfance, Et dont je vous ai vu prfrer le sjour Au tumulte pompeux dAthnes et de la cour ? Quel pril, ou plut.t quel chagrin vous en chasse ? Hippolyte Cet heureux temps nest plus. Tout a chang de face Depuis que sur ces bords les dieux ont envoy La fille de Minos et de Pasipha. Thramne Jente
27、nds. De vos douleurs la cause mest connue. Phdre ici vous chagrine et blesse votre vue. Dangereuse maratre, peine elle vous vit, Que votre exil dabord signala son crdit. Mais sa haine sur vous autrefois attache, Ou sest vanouie, ou sest bien relache. Et dailleurs quels prils vous peut faire courir U
28、ne femme mourante, et qui cherche mourir ? Phdre, atteinte dun mal quelle sobstine taire, Lasse enfin delle.mme et du jour qui lclaire, Peut.elle contre vous former quelques desseins ? Hippolyte Sa vaine inimiti nest pas ce que je crains. Hippolyte en partant fuit une autre ennemie : Acte premier Ph
29、dre Je fuis, je lavouerai, cette jeune Aricie, Reste dun sang fatal conjur contre nous. Thramne Quoi ? vous.mme, Seigneur, la perscutez.vous ? Jamais laimable soeur des cruels Pallantides Trempa.t.elle aux complots de ses frres perfides ? Et devez.vous ha.r ses innocents appas ? Hippolyte Si je la h
30、a.ssais, je ne la fuirais pas. Thramne Seigneur, mest.il permis dexpliquer votre fuite ? Pourriez.vous ntre plus ce superbe Hippolyte Implacable ennemi des amoureuses lois, Et dun joug que Thse a subi tant de fois ? Vnus, par votre orgueil si longtemps mprise, Voudrait.elle la fin justifier Thse ? E
31、t vous mettant au rang du reste des mortels, Vous a.t.elle forc dencenser ses autels ? Aimeriez.vous, Seigneur ? Hippolyte Ami, quoses.tu dire ? Toi qui connais mon coeur depuis que je respire, Des sentiments dun coeur si fier, si ddaigneux, Peux.tu me demander le dsaveu honteux ? Cest peu quavec son lait une mre amazone Ma fait sucer encor cet orgueil qui ttonne. Dans un age plus m.r moi.mme parvenu, Je me suis applaudi quand je me suis connu. Attach prs de moi par un zle sincre, Tu me contais alors lhistoire de mon pre. Tu sais combien mon ame, attentive ta voix Acte premier
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